L’attachement

Publié le 22 Octobre 2013

 

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capture d'écran d'une publicité pour Orangina

 

 

 

Sara Montiel Quizàs

 

8 millions de chiens, 10 millions de chats. La France est le pays d’Europe qui compte le plus grand nombre d’animaux domestiques. Voilà une statistique que je mettrais volontiers sur le compte de notre difficulté à vivre ensemble dans un pays où un de nos humoristes particulièrement grinçant a pu écrire : « Plus je connais les hommes, plus j’aime mon chien. » (Suivi de Plus je connais les femmes, moins j’aime ma chienne. »)  

La chose reste pourtant plutôt mystérieuse, pour moi qui n’a pas été élevé avec des animaux de compagnie et qui n’a eu dans son enfance que l’expérience des animaux d’autrui : des chiens forcément aboyeurs quand ils ne vous mordent pas ou des chats farouchement indépendants qui vous griffent en quittant vos genoux.

 

Bref, j’ai toujours placé l’attachement pour l’homme bien au-dessus de celui pour l’animal que j’ai tendance à considérer comme un pis-aller, pouvant virer au pitoyable s’agissant d’un pédé (voire pire d’un couple de pédés), promenant son chien (en-remplacement-de-l’enfant qu’il-n’a-pas-pu-concevoir).

Rétrospectivement, j’ai aussi conscience d’avoir manqué d’empathie lorsqu’une voisine m’a appris que N. son petit chien était « décédé ». J’espère seulement avoir été un peu moins mauvais lorsqu’une autre, qui vit seule, m’a annoncé que je n’aurai pas à nourrir son chat durant son absence puisqu’il était mort quelques mois auparavant.

 

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Les gentilhommes du duc d’Orléans dans l'habit de Saint Cloud Félix Philippoteaux au musée Nissim de Camondo où j'ai amené Gaëlle lors de son passage à Paris

 

Pour autant, ces a priori ne m’ont nullement empêché de trouver intéressante cette « Tête au carré » sur l’attachement, «ce lien magique, ce mécanisme brillant et subtil, cette force vitale qui oriente toute la vie des individus » chez les espèces animales comme chez les êtres humains, entre les animaux domestiques et les hommes.  

Une fois que l’on sait que les animaux partagent avec nous le monde des émotions fondamentales : la passion, la jalousie, l’amitié, l’amour, la fidélité, l’infidélité, le deuil,…, a fortiori quand elle s’exprime inter espèces (entre l’animal et l’homme), il est bien difficile de ne pas succomber à l’anthropomorphisme.

 

Sans l’attachement, on périt. L’attachement, ce lien qui rend deux êtres uniques, cette relation harmonieuse bénéfique pour les deux, joue une fonction vitale qui permet la survie des espèces. En premier lieu, importe l’attachement de la mère pour son petit qui le nourrit, le protège et dont la proximité permet l’apprentissage (chez certaines espèces d’oiseaux, c’est le père qui peut en prendre soin car il n’y a pas d’allaitement comme chez les mammifères), vient ensuite, sauf dysfonctionnement, la nécessaire phase de détachement du petit de la mère qui se met à refuser le contact pour lui permettre de s’en aller.

Parfois l’attachement dure toute une vie : n’est-il pas troublant de savoir que des éléphants reviennent sur le lieu où se trouve le squelette de leur mère dont ils prennent soin en allant chercher des branchages pour le recouvrir ?

 

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Paul Cadmus Le bain 1951

Exposition Masculin/masculin au Musée d'Orsay

 

Toutefois le lien entre le chien et l’homme est sans doute le plus touchant. Plaisir d’être au contact, regards enamourés, grands coups de langue, appels ou réponses au jeu, il est difficile de ne pas succomber à ces manifestations d’attachement.

Ceux qui ont lu ou vu à la télé Lassie, savent aussi qu’un chien peut parcourir des centaines de km pour retrouver son maître et l’endroit où il vit. C’est un fait vérifié, pas une légende urbaine. On a même vu des chiens inconsolables après la mort de leur homme de compagnie : un chien en écosse est ainsi devenu le symbole de la loyauté après qu’il fut resté 13 ans sur la tombe de son maître avec qui il avait vécu un an et demi. Il est des attachements pathologiques, celui-ci en était un.

 

 

Ma vie avec Liberace de Soderbergh

 

Souvent, la question revient : papa est-il conscient de sa décrépitude ? Maman dit que non, que pour se protéger notre père est dans le déni de son état. Comment ne pas le concevoir ? On peut aussi penser qu’il a des instants de lucidité. Cet été, je crois en avoir été le témoin. Mon père que j’avais sollicité afin qu'il apportât le lendemain matin la débroussailleuse pour réparation dans un village voisin, quelques temps après m’a demandé à voix basse si je pouvais lui noter sur un papier ce que je lui avais dit des dysfonctionnements de la machine. Le jour suivant, s’il oublia le papier, il s’acquitta toutefois de sa mission.

 

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Nicolas Maury le triomphe de l'amour

m.e.s. de Galin Stoev au TGP à Saint-Denis

 

Maman qui, elle, pète le feu, ne peut plus envisager un seul projet hors du territoire restreint dans lequel notre père a encore ses repères, ni d’ailleurs de le laisser, ne serait-ce que quelques jours, aux bons soins de ma sœur. Comme papa parle de moins en moins, souvent pour ne répéter que des choses plutôt insignifiantes ou pour fanfaronner, et qu’il s’ennuie sans doute à force d’impossibilité mentale mais aussi physique, maman fuit le huis-clos à grands renforts d’invitations et de table toujours ouverte. « Il est mieux quand il y a du monde. Ça le stimule. » « Pendant ce temps, tu n’es plus triste, ai-je pensé et ça aussi c’est essentiel. »

C’est une affreuse expérience que de devoir s’occuper d’un mari comme d’un enfant. On chérit toujours un enfant affectueux, les gestes d’affection d’un mari qu’on veille comme un enfant, peuvent agacer, ceux que mon père prodigue à ma mère paraissent toujours l’insupporter. Quant à la bagatelle, je vous laisse imaginer !

 

 

La Danza de la Realidad d'Alejandro Jodorowsky

 

Mais notre mère a plus d’un tour dans son sac. Elle a acheté par le « boncoin » une petite boule de poils blancs très sympathique, pour ne pas dire irrésistible, baptisée Hercule et qui passe désormais de longues heures à se faire caresser par mon père.

... ou par ma mère.

 

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NGT / Les animaux homos en expo à Oslo

 

 

 

Nicole Ferroni  

Les araignées, c'est comme les homosexuels, tolérons les !

 

 

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Miguel Angel Rojas

Nocturnes de Colombie Photoquai 2013

 

 

  
 
Electric Light Orchestra Secret messages
 

Rédigé par Thomas Querqy

Publié dans #famille, #vivre ensemble, #Paris, #expos, #avec un grand A

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