ideologie

Publié le 1 Décembre 2006

Quand le journal Le Monde se fait média de l’homophobie

 

1er Décembre : journée mondiale de lutte contre le Sida, en dernière page du supplément Livres du Monde daté de ce jour, ça :



undefined

 

Comme toute la presse quotidienne, le journal Le Monde a besoin d’argent, la vente d’un encart publicitaire en 4e de couverture du supplément Livres, ça ne se refuse pas.
Même si l’extrait choisi par l’éditeur est une dangereuse contre vérité scientifique, stigmatisante pour la population homosexuelle ?
Son lecteur saura-t-il qu’en 1993, l’Organisation Mondiale de la Santé a retiré l’homosexualité de la liste des maladies mentales ("troubles mentaux, troubles névrotiques de la personnalité et autres non psychotiques"), 20 ans après que l’Association psychiatrique américaine l’eut fait ?
 

apartheid.gif

Discriminations à l’embauche

27/11/2006
Entendu sur France Inter 
Adia, en collaboration avec un sociologue de l’Université de Paris I Sorbonne, finance la mise en place d’un « baromètre des discriminations à l’embauche ».
En un an de recueil de données, on apprend sans trop de surprises que, pour avoir le plus de chances d’obtenir un emploi, il vaut mieux ne pas être « vieux » (handicap n° 1 qui vous frappe désormais à partir de 45 ans), avec un patronyme maghrébin (handicap n°2) et handicapé. Dans une moindre mesure, être femme avec des enfants ou avoir un visage disgracieux (pour certains métiers) peut réduire vos chances d’être embauché.
 
Autrement dit, comme le rappelait Coluche qui citait de mémoire Dieu :
Il y aura des hommes grands et il y aura des hommes petits.
Il y aura des hommes beaux et il y aura des hommes moches.
Il y aura des hommes blancs et il y aura des hommes noirs. Et tous seront égaux,
mais ce ne sera pas facile.
Et il y en a qui seront noirs, petits et moches et pour eux ça sera très dur !
 
undefined
 
Bref, la science progresse.
Comment ne pas soutenir la mise en place de ces outils visant à objectiver le phénomène, pour ensuite proposer notamment des mesures de discrimination positive ? Pourtant, je ne peux m’empêcher de penser que le bruit médiatique autour de cette question est l’arbre qui cache la forêt de la pénurie généralisée d’emplois.
Quand une offre d’emploi suscite l’envoi de 6 CV (c’est le rapport offres d’emplois/CV envoyés du baromètre Adia), comment s’étonner encore qu’à compétences identiques, le recruteur écarte le vieux (trop cher, trop vindicatif, trop lent ?), l’arabe ou le noir (préjugés racistes), l’handicapé (je ne suis pas un organisme de réinsertion), la femme (elle devra abandonner son poste pour faire des enfants qui l’obligeront ensuite à s’absenter), le moche (vous connaissez beaucoup de gens qui préfèrent la laideur à la beauté ?) ou le pédé (je ne supporte pas).
Sans compter qu’en situation de très grande pénurie, la discrimination s’opère souvent « en douce », ce qui comptera pour trouver le Graal de l’emploi sera avant tout le relationnel, « le piston », l’appartenance à des réseaux. D’ailleurs, comme souvent dans l’immobilier pour des biens rares, il n’y aura pas d’offre publique, et dans ces cas, c’est l’ensemble des autres demandeurs d’emploi qui est discriminé et plus seulement les catégories cités supra.
 

 
undefined



« L’art présumé coupable » et « le crime sans victime »

 

28/11/2006
L’ancien directeur du Musée d’art contemporain de Bordeaux vient d’être mis en examen pour « diffusion de message violent, pornographique ou contraire à la dignité, accessible à un mineur présentant un caractère pornographique » à l’occasion de l’exposition « Présumés innocents : l’art contemporain et l’enfance » organisée en 2000.
Cette mise en examen fait suite à la plainte déposée quelques semaines après la fermeture de l’expo, par une association de « protection de l’enfance » contre les organisateurs, les artistes et même les organismes prêteurs.
 
Diable ! Qu’a-t-on donné à voir aux visiteurs qui justifie qu’il soit donné suite à une plainte concernant une exposition vieille de 6 ans et qui n’avait alors fait plus de scandale qu’un rapport de la brigade des mineurs vide d’objets de délit ?
La lecture de la double page de Libération me permettra en tout et pour tout d’apprendre que la plainte fait référence à une vidéo tournée par la mère d’une artiste autrichienne, Elke Krystufek, sur laquelle cette dernière « se masturbait avec un concombre avant de se coudre le sexe » mais dont il n’a été retrouvé aucune trace. Un surf rapide avec Google ne m’a pas permis de trouver image de l’artiste plus sulfureuse que celle ci-contre : à savoir la nudité d’ados juste pubères, en rien pornographique.
 
undefinedComme le souligne Gérard Dupuy dans son édito, ce qui est en jeu dans ces assauts (réguliers) de ligues morales, c’est la liberté d’expression. En général, les tribunaux leur donne tort mais elles parviennent à leurs fins par la voie du réflexe toujours plus systématique d’autocensure.
 
Dans le Monde, Ruwen Ogien, dont j’avais apprécié le dernier ouvrage, pointe également une conséquence liberticide de ce genre d’affaire : elle réhabilite « le crime sans victime ».
Sont à ranger dans les crimes sans victime nous rappelle-t-il, notamment les offenses au « drapeau de la nation », à « Dieu », à la « patrie », aux « signes de la religion », sous les qualifications de « sacrilège, « hérésie », « blasphème », « subversion »,... 
Ici, nuls dommages évidents subis par qui que ce soit, du fait de l’exposition, juste une accusation d’atteinte à une idée : « l’image de l’enfance innocente ».
 
Libération du 20 novembre 2006 http://www.liberation.fr/culture/218154.FR.php
 
 
Entrevue radiophonique avec Ruwen Ogien à propos de son livre : « Penser la pornographie » http://www.creum.umontreal.ca/Penser-la-pornographie-interview.html

 
undefined


Eli, Provincetown 1981
 
Le Musée du Jeu de Paume présente en parallèle une rétrospective du travail de Friedlander des 60’s à nos jours et des photographies de Joël Meyerowitz prises entre 1970 et 1981 sur le site de l’hôtel de Sully. Pour l’un des clichés en noir et blanc, pour le second, des photos en couleur.
Si Friedlander est aussi connu pour sa photographie des grands espaces américains, tous deux font de la ville américaine et des gens qui la peuplent, le sujet principal de leurs « reportages photographiques ».
L’ensemble ne m’a aussi pas particulièrement ému, la faute au sujet (beaucoup de tirages de proches dont l’intérêt ne dépasse pas le cercle intime du photographe), la faute au format des photos (souvent trop petit pour une exposition), la faute à l’espace confiné d’exposition et à la foule sur le site Sully.
 
Du coup, j’ai eu des pensées davantage « techniques » : chez Friedlander, je me suis pris à rêver pour ma pratique photographique d’un boîtier permettant une plus grande ouverture de diaphragme et ainsi de profondeur de champ afin d’obtenir la netteté sur tous les plans du cliché (ex. de la photo de l’affiche de l’exposition) ; chez Meierowitz, j’ai passé mon temps à comparer la qualité des tirages argentiques sur papier photo aux impressions numériques HP pour conclure en faveur des tirages argentiques.
 
undefined
 
Une photo m’a néanmoins séduit. Un grand format bien sûr. Le garçon brun à l’épaule dénudée, le pectoral droit recouvert d’un tatouage jusqu’à la clavicule, main gauche sur la hanche gauche légèrement déhanchée, mégot juste éteint pincé entre le pouce et l’index de la main droite, la pose un peu provocante du mauvais garçon (la photo est prise en légère contre plongée), ses yeux un peu cernés qui vous fixent (qu’a-t-il fait de son corps ?), le plan américain laisse entrevoir le haut d’un short blanc. Ce garçon brun s’appelle Eli, la photo a été prise à Provincetown en 1981.
 
PS1. Meierowitz sort actuellement un livre présentant son travail exclusif sur « Ground zero ».
 
PS2. Le responsable de l’atelier photographique du musée d’Orsay nous a annoncé qu’ils avaient en début d’année démonté le laboratoire argentique : « Le numérique a gagné. La qualité des tirages numériques est équivalente à celle de l’argentique, pour des coûts d’exploitation infiniment plus faibles. »
 
 

undefined
Wolfgang Tillmans - Dunst 

 

Voir les commentaires

Rédigé par Thomas Querqy

Publié dans #homophobie, #vivre ensemble, #économie, #libertés, #idéologie, #les fâcheux, #expos

Repost0