LADY BOYS

Publié le 12 Février 2007

 

L'ange Dima Shine

J’avais promis le matin à Goran et Fernando que je les appellerai pour les rejoindre au cirque Phénix sur la pelouse de Reuilly, si j’avais terminé une version satisfaisante du communiqué de presse que Goran m’avait demandé pour sa prochaine exposition.

 

Un peu fatigué d’avoir fréquenté durant plus d’une journée l’œuvre du sculpteur, ses anges militaires croisés en Colombie et leurs lointains parents du baroque triomphant de la Vice-royauté d’Espagne, j’ai quitté avec joie l’ordinateur par une belle journée d’hiver pour les retrouver à l’entrée du chapiteau où  se tenait la finale du Festival mondial du cirque de demain. Ils avaient déjà pris les places et la bonne surprise fut que Goran m’offrait la mienne. Je lui ai tendu avec assurance le texte dont j’avais accouché puisque j’avais « l’imprimatur » de mon cher et tendre à qui je l’avais lu au téléphone. Le maître était satisfait si ce n’était une citation sur son travail qu’il ne souhaitait pas que je réutilise. Fernando aimait également. Ouf ! Place au cirque !

 

On oublie toujours que le cirque n’est pas qu’un bonheur d’enfants. Trapézistes, acrobates, funambules, clowns, jongleurs... toutes les disciplines du cirque m’épatent, celles qui magnifient le corps masculin par-dessus tout. Ici, les artistes ont tous moins de 25 ans, un vrai régal ! Comme Goran qui m’a paru s’enfoncer dans son fauteuil, tout intimidé devant cette beauté slave, j’ai succombé à la beauté de l’ange Dima Shine.

 

Je n’ai pas assisté à la remise des prix : comment imaginer récompenser un numéro plutôt qu’un autre. Dans leur catégorie, je les ai tous trouvé excellents. Goran à qui je montrais le lendemain les photos de l’équilibriste glanées sur Internet, m’a dit avoir surpris chez ce dernier, durant la cérémonie, quelques gestes pleins de grâce, qui en faisant de lui un garçon plus ambiguë, nous le rendait définitivement exquis.

 

 

 

Festival mondial du cirque de demain 2006 en images :

 

http://burguscircus1.free.fr/diaporama/CIRQUE%20DEMAIN%202007/Cirque%20demain%202007%20Les%20laureats/

 

http://www.aucirque.com/actus.php?num=3016&genre=4

 

http://www.aucirque.com/actus.php?num=3017&genre=4

 

 

Médecines très douces

I'm crucified
Crucified like my savior
Saintlike behavior
A lifetime I prayed

 

"Crucified" Army of lovers

 

Natacha, ma prof de piano donne des cours particuliers de clavecin à une femme  médecin chinoise. La soixantaine, en paraissant 40, elle est arrivée en France après avoir résidé à Hong Kong où elle s’était réfugiée pour fuir la « Révolution culturelle ». Petite, elle a bénéficié d’une éducation traditionnelle de lettrés. Le principe : les maîtres gardent l’enfant confié un an, s’il présente de bonnes dispositions pour les enseignements, il est gardé, ce qui fut son cas, sinon il retourne chez ses parents. Outre, la méditation, les enseignements philosophico religieux, sont enseignés les arts martiaux, la calligraphie, la pratique des instruments, la médecine traditionnelle, etc.

 

En France, elle a obtenue son diplôme de médecine (allopathique) et a été interne en Bretagne. Simultanément, durant des années, elle a mené une véritable enquête pour connaître les médecines parallèles pratiquées dans les campagnes françaises (magnétiseur, rebouteux,..). Il lui fallut beaucoup de temps pour réussir à délier les langues à ce sujet (menace « d’exercice illégal de la médecine » et loi du silence dans ce milieu).

 

Un jour sa chinoise lui dit :

 

-         Natacha, tu vas arrêter de fumer, tu vas faire la surprise à Sabine.

-         Mais je ne veux pas arrêter de fumer.

-         Tu peux continuer à fumer toutes les cigarettes dont tu as très envie. Peut-être aussi qu’après  tu fumeras toute ta vie une ou deux cigarettes par jour.

 

Depuis Natacha, qui fumait un paquet par jour, a arrêté de cloper (ou presque, une à deux cigarettes par jour), sans traumatisme. Sa chinoise n’exerçant plus (grosse pointure identifiable sur Internet, elle ne fait plus que des formations), elle lui a donné les coordonnées d’un de ses premiers élèves en France.

Je les ai gardé précieusement, pour enfin, après m’y être longtemps préparé à l’avance, me décider à lui rendre visite

 

 

 

En haut du petit escalier en colimaçon, une photo d’un lama bouddhiste. Ça parle à l’intérieur, je frappe, un homme jeune rasé, bonne tête, vêtu « ethnique » sans exagération, éteint son portable et m’accueille dans une douceur très asiatique. Un parfum d’encens flotte dans la petite pièce Il me fait me déchausser, enlever ma montre.

 

-         vous vous rappelez pourquoi je viens vous voir ?

 

-         non, si vous pouviez me le rappeler

 

-         pour m’aider à arrêter de fumer. Oui je sais, ce n’est pas trop original en ce moment !

 

-         vous fumez beaucoup ?

 

-         10 par jour, mais je suis très accro, j’aime fumer, toutes mes cigarettes sont associées à de très bons moments.

 

-         .... vous êtes rempli d’énergie et à un moment donné il vous faut souffler, vous le faîtes avec la cigarette (quelque chose approchant)

 

Il me fait m’allonger et à peine m’a-t-il touché le poignet qu’il me dit :

 

-         vous êtes en bonne santé mais votre foie est faible, c’est bien que vous veniez maintenant, on va rentrer dans la saison des foies (quelque chose dans le genre)

 

-         vous êtes très fort, j’ai eu une hépatite A, j’ai tendance à trop boire et (en rigolant) j’oublie de manger des artichauts

 

-         oh vous savez, si votre organisme assimile mal les artichauts, vous pouvez manger tous les artichauts, ce sera sans effet, comme pour les vitamines

 

-         saison des foies, c'est-à-dire que le foie tombe plus facilement malade ?

 

-         C’est cela

 

Après m’avoir prévenu, il commença à poser des aiguilles en me disant de sa voix douce qu’on allait « réactiver les hormones » (quelque chose dans le genre).

 

-         Fascinantes ces techniques asiatiques, j’ai fait une formation de massage en Thaïlande et  il y était proposé une formation exclusivement sur le massage de pied à but thérapeutique (la réflexologie, je crois), j’ai rapporté une planche de pied sur lequel sont indiqués tous les points et l’organe avec lequel ils sont en lien... Vraiment fascinant !

 

-         Ce sont le résultat de milliers d’années d’expériences accumulées, c’est aussi la même chose avec l’herboristerie.

 

 

 

Il me posa un genre d’écharpe légère chauffée sur le visage. J’ai cru qu’il allait me piquer le visage à travers ce textile, mais non, il m’ajouta une couverture également très légère sur le reste du corps. « Agréable ! Comme dans un caisson d’isolation sensorielle » lui ai-je dit. Puis il fit tinter différentes cloches dont j’ai senti parfois charnellement les ondes, puis un peu de percussions de plus en plus discrètes. Fonction religieuse ? Fonction relaxante ? Fonction thérapeutique ?

 

Ma respiration était plutôt longue et régulière. Est-elle naturelle ou est-ce moi qui m’impose celle-ci Un peu gêné de me trouver dans cet état devant un étranger. Mais non, il a l’air de s’occuper, j’entends tourner des pages. « Est-il en train de me faire mon programme ? » Puis plus rien, silence presque absolu. Je désire une respiration régulière mais naturelle. « L’est-elle ». Je recherche davantage de décontraction. Mon corps pèse sur la table et je ressens une douleur à la jambe droite mais je ne bougerai pas. Est-ce en lien avec ma douleur au genou ? A deux ou  trois reprises, les battements de mon cœur se sont accélérés quelques instants. « Les  hormones qui se réveillent ? »

 

Au bout d’un certain temps, il m’annonce qu’il va m’enlever les aiguilles. Je lui parle de la douleur à la jambe.

 

-         Ce sont les toxines de l’estomac qui vous font mal, c’est très fréquent car l’estomac est un organe qui récupère tous les chocs de la vie non digérés

 

-         Ah oui, c’est vrai, on parle des tripes...

 

¾ d’heure s’étaient écoulés. 70 euros. Prévoir une dizaine de séances de remise sur pied. Voici qui s’appelle un investissement santé ! Rendez-vous est pris pour la fin de la semaine. Il me pose 3 aiguilles à l’oreille droite. Je me rechausse. Il me tend une tisane.

 

-         Si on me demande ce que vous me faites, je dis quoi ? A quelles  techniques avez-vous été formé ?

 

-         Aux deux médecines chinoises, la médecine Tao (il prononce DAO) et bouddhiste (il me tend sa carte)

 

-         Hummm, ce n’est pas mauvais pour une tisane. ça sent... la noix

 

-         il y a du ginseng

 

-         ah c’est curieux, je trouve que ça fleure la noix

 

-         la cannelle

 

-         Ah oui, bien sûr (un peu vexé, tellement commun et identifiable).

 


 

Deux jours plus tard, j’oublie souvent mes aiguilles dans l’oreille et hier en voulant me gratter, j’en ai fait tomber une ; je diffère toute la journée mes pauses clope, pour finir la journée avec un gain minable de deux ou trois cigarettes. Un tantinet déçu par cette modeste performance pour une dépense hebdomadaire de 140 euros, je lis « Attention danger TABAC » (Les archives du Monde 2 du 3 février 2007) :

 

En matière de nicotine, comme à propos de tous les poisons du sympathique, il y a lieu de tenir compte des réaction individuelles, et c’est bien là que se manifestent les insuffisances de l’expérimentation chez l’animal et de la statistique chez l’homme, sur quoi se fondent les notions habituelles de toxicité. Ainsi apparaît-il que des arguments – comme celui cité partout de cet Allemand qui fumait vingt-cinq havanes par jour, mourut à 80 ans et ne consomma pas moins de 547 000 cigares dans sa vie – ne prouvent en fait absolument rien, sinon qu’il s’agissait d’un organisme particulièrement résistant au tabac. [...]

 

Il faut être juste : en regard de tant de méfaits, le tabac compte quelques avantages. Il est bactéricide à l’égard de certains germes, ce qui a quelque intérêt en période d’épidémie ; il s’oppose à la carie dentaire, il est diurétique, il fluidifie les sécrétions bronchiques et la cigarette du matin peut avoir un effet laxatif. Mais cela n’est vrai que pour une consommation modérée ; chez les grands fumeurs le bilan s’inverse. En pratique que faut-il conseiller ? Fumer modérément et jamais à jeun, utiliser le fume-cigarette ou la pipe à long tuyau, ne pas fumer le dernier tiers des cigares ou cigarettes, ne pas inhaler la fumée ; cesser de fumer à la moindre alerte, principalement quand l’artérite, l’aortite ou l’angine de poitrine menacent, bref ne pas prendre pour modèle le fumeur dont nous avons parlé plus haut, mais dont l’histoire ne dit pas quel fut son rendement professionnel, ni l’activité de sa pensée, ni l’état de son cœur.

 

Professeur André Lemaire Le Monde du 18 Mai 1950

 

Liens : L'homme sans volonté in « Adolescences, conscience et décadence" 

 

                Arrêter de fumer tue in "Vous êtes joli vous, déjà connu l'homme ?"

 

 

 

Lady boy

Siem Rep (Cambodge), mardi 6/7/2004

 

16H – Gabriel est d’humeur sieste et piscine. Envie de faire quelques photos au couchant : j’oscille entre partir en bicyclette à la découverte de la ville et retourner en motodop à Angkor Vat. Va pour la 2e alternative. Ça va vite une moto par rapport à un tuk tuk. Mon chauffeur s’arrête brusquement : il extirpe de sous sa selle un boléro avec un n° au dos, c’est son n° de licence qui l’autorise à transporter un touriste, seul moyen de ne pas avoir d’embrouilles avec la police. Est-ce vraiment le sien ou se l’est-il fait passer par un autre ?

 

La lumière sur le temple et les bassins n’était pas si mal pour quelques clichés. Pour un « sunset », par contre,  il faudra repasser. Les vêtements trempés de sueur, j’enfourche de nouveau la mob du moto-taxi.

Il roule beaucoup moins vite qu’à l’aller : il veut me parler malgré son anglais rudimentaire.

 

Mon refus d’aller voir ce soir les danseuses Apsaras l’amène illico à me proposer un plan massage à une heure du mat ( ?) Plus je décline ses propositions, plus il se fait cru et explicite : « with girl, boom boom 10 $ (...) Fuck, you understand ? With lady boy, same price. You know what is lady boy ? (…) Very good lady boy, small (?) Not big for boom boom (…) I go with lady boy, I like, good (…)”

 

Il roule toujours aussi lentement et je ne l’arrête plus : le voici en train de mimer une fellation, faute de pouvoir me caser la totale. Je crois qu’il a parlé de 3 $. Je finis par lui crier en rigolant : « Stop ! ». Il a sursauté, freiné brutalement, étonné.

 

Lui aussi « no papa, no mama », je lui demande son âge mais il ne connaît pas le nombre en anglais, alors il me montre à deux reprises des chiffres sur son tableau de bord. Je ne comprends pas, non découragé, il extirpe un stylo, je lui tends aussitôt ma main. La moto zigzague mais il a réussi à tracer « 19 ».

 

Devant l’hôtel, le sourire aux lèvres, il me demande un « tip ». Je proteste en simulant de lui donner une claque. Il le prend bien et rejoint « Mister  Sal », le jeune tuk tuk faisant le pied de grue devant l’hôtel. Ce garçon est toujours très expansif, pour ne pas dire très efféminé. Entre-t-il dans la catégorie des « Lady boys » ?

 

 


 

  "Je hais vos idées, mais je me ferais tuer pour que vous ayez le droit de les exprimer !"  Voltaire.

 

 

Rédigé par Thomas Querqy

Publié dans #spectacle, #écrire, #addiction, #les amis

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O
Je n'ai pas de souvenir de proposition sexuelle à Siem Raep, en revanche je me souviens m'être retrouvé à terre suite à une gamelle à moto. Mon pilote a cru qu'il passerait devant le vélo d'une vieille femme, résultat: nous les quatre fers à l'air et le vélo de la pauvre femme en deux. Notre pilote s'est mis en colère et ne il voulait pas dédommager la femme, du coup c'est nous qui lui avons laissé un peu d'argent. Etonnant ces rapports entre des gens du même coin avec aucun respect pour la personne âgée. On s'est dit après coup qu'il devait compter sur notre générosité ....
Répondre
T
L'accident à l'étranger, ma grande frousse depuis qu'on a fait un vol Bangkok-Paris plutôt inconfortable, coincé qu'on était par deux brancards d'un rapatriment sanitaire (la 3e personne, avait-on appris, était morte dans l'accident).<br /> Tu comprendras donc que je préfère ce souvenir de "proposition sexuelle" à Siem Reap, qui ne fut d'ailleurs pas le seul : un soir au couchant à la terrasse d'un bar flottant sur le lac (Boeng) Kak envahi de jacinthes. Notre "tuk tuk", à qui on avait dit de nous promener dans la ville, avait eu la bonne idée de nous déposer dans ce coin qui s'est rapidement avéré pas très bien fréquenté mais qui était enchanteur. Beer girls ou lady boys ? Nous ne sommes pas allés vérifier