avec un grand a

Publié le 9 Novembre 2006

 

19/01/2006

 

La galerie Peter ’s friend où mon prof de modelage expose sa série « Mouvements et absences » autour des chevaux durant le mois de janvier est gérée par une société qui s’appelle Carré VIP. Tellement VIP que je n’arrive pas à y avoir accès : lundi fermé, aujourd’hui, bien que m’y trouvant dans les horaires d’ouverture, j’étais invité à appeler un numéro. L’a bien besoin de ses cours à l’ESAA pour vivre Paul Nees, ce n’est pas avec l’activité débordante de son galeriste qu’il paiera son loyer.

 

 

 

 

Suite à un papier dans Télérama sur le retour du dessin sur le marché de l’art, j’ai été faire un tour à la galerie Eric Dupont où dans le cadre d’une exposition consacrée au dessin, « les israéliens Gil et Moti racontent en 9 dessins le trio amoureux avec un palestinien, en un panachage surprenant de mails, croquis et SMS. » Ici, c’est ouvert. Aux murs d’une grande pièce blanche et vide sont accrochés les dessins. Un escalier en colimaçon permet d’accéder en sous-sol. Derrière une porte blanche, j’entends un mec parler au téléphone. Rien de ce qui est accroché n’est vraiment remarquable, si ce n’est sur le mur d’en face, à l’aquarelle sur un format A3, une ronde de trois mecs nus vus en contre plongée, autrement dit, une ronde de trois bites couillues. Les autres dessins censés nous raconter ce trio amoureux, sont bâclés sur des formats A4 de piètre qualité toujours à l’aquarelle très diluée avec systématiquement un texte en anglais également peint à l’aquarelle. Vraiment sans intérêt et pourtant le galeriste ose demander 1600 euros pour chacun de ces bouts de papiers. Une raison de plus pour continuer à dessiner et peindre. Y a de l’espoir ! Après ce ne sera plus qu’une question de relationnel.

Je plaisante. La magie du dessin seule importe.

 

 

 

L’insouciance, c’est fini (tendance hypocondriaque)

 

Hier, on s’est fait un flip avec Natacha qui venait d’apprendre coup sur coup qu’une jeune fille de 25 ans de ses connaissances avait chopé le cancer et que sa cousine de 39 ans qui avait mal à la mâchoire et je ne sais encore où, venait de se faire diagnostiquer le plus douloureux des cancers, le cancer des os. Sitôt qu’elle en a parlé à Corinne, sa copine, celle-ci a éclaté en sanglots  parce qu’elle pétait soudain de trouille d’être touchée à ce ventre qui la faisait ce jour-là souffrir (elle a des problèmes récurrents du côté des organes de reproduction qu’elle fait surveiller).

Et moi, le lendemain, devinez où j’avais mal ? A la mâchoire.

Devinez à quoi j’ai pensé pendant deux jours ?

Comme disait Nathalie, ce qui fait vraiment la différence entre nous et un jeune d’une vingtaine d’années (le nouveau baby sitter de Samuel, Johan, qui séduit beaucoup sa maman), c’est l’insouciance.

 

 

 

PS Depuis le 1er janvier Gabriel peut avoir mal au coude (« comme si on me piquait »), le médecin lui a donné une pommade doutant que ce soit une tendinite. Il a tout de suite craint d’avoir la maladie rare et invalidante de Marie Hélène.

 

Hier, JG m’annonce le cancer d’Elenescu mon ex proviseur parti à la retraite. On lui a détecté alors qu’il avait mal au bras, en fait, c’était la tumeur de son cancer du poumon qui le faisait souffrir. Je me jure de ne pas raconter cela à Gabriel et connaît un espoir lorsque ma soeur évoque avoir eu un problème similaire qui provenait d’un désordre vertébral et qui s’est réglé avec un ostéo.

 

 

 

 

 

Quête généalogique d’optimisme

 

Mon chercheur favori, Gab s’est lancé dans des statistiques sur sa base de données Hérédis dont il a exporté une partie sur Excel. Objet de la recherche : sortir des tendances d’espérance de vie dans son arbre généalogique. D’après ce que j’ai vu, on vivait en général vieux chez ses ancêtres. Une manière plutôt plus intelligente qu’une autre de réduire sa peur de la mort ?

 

 

 

 

Le secret de Brokeback mountain d’Ang Lee

21/01/2006

 

Non sans surprise, j’ai lu quelque part que le réalisateur du Wedding banquet n’était pas gay. Ni Jake Gyllenhaal qui incarne le très séduisant Jack Twist, ni son amant le mutique Ennis n’aiment eux non plus les hommes dans la vie (mais le contraire m’eut surpris tant de nos jours jouer un personnage homo est devenu un passage obligé dans la carrière d’un acteur). Et pourtant, magie du cinéma, à aucun moment le spectateur pédé ne doute de la véracité de leur amour tragique. Durant près de 2H, nous avons souffert avec eux de l’homo phobie ambiante dans le Wyoming et le Texas des années 60-70 qui en rendant leur amour impossible, leur fait rater leur vie, une vie d’enfermement dans un rôle injouable qui les rend étrangers aux autres comme à eux-mêmes, une vie  d’attente des trop rares pèlerinages à Brokeback mountain, rares et trop courts points de suspension qui les maintient en vie mais pour les abattre davantage quand vient le temps de la séparation.

 

Quoi qu’en dise un connard de journaliste du New York Times, ce film est certes un mélodrame mais un mélodrame courageux qui fera date dans l’histoire du cinéma gay[1] mais aussi dans celle des homosexuels. Si l’homo phobie n’était pas toujours aussi commune sur notre planète, y compris dans nos pays occidentaux « «où une star de la chanson peut se marier en grandes pompes avec un jeunot », je rajouterais que j’ai tout de suite trouvé jubilatoire cette énorme transgression consistant pour un taiwanais naturalisé américain à oser faire s’aimer des cow-boys, personnages emblématiques de la virilité et du machisme dans le genre du western.

 

Le lendemain de la projection, au réveil, Gabriel m’a raconté son rêve :

 

« J’accompagne quelqu’un au départ d’un voyage en bateau ? Il s’avérera qu’il s’agit de mon frère, après ce peut être quelqu’un d’autre. Je l’accompagne dans un voyage comme si c’était un voyage pour Brokeback mountain, un retour en quelque sorte, vers un lieu d’amour et je suis content pour celui que j’accompagne et qui part avec l’autre. »

 

 

Le secret de Brokeback mountain d'Ang Lee (suite)

29/01/2006

 

Ce film deviendra-t-il un « blockbuster » au-delà de son public gay ?

Bon, les filles qui n’ont pas d’aigreur à l’égard des pédés, ça devrait leur plaire mais les mecs hétéros, comment ce genre de film peut-il les intéresser ?

Dans Charlie hebdo, Siné le haineux est venu conforter mon pressentiment :

 

Quand j’étais môme, j’adorais les « westerns » et leurs cow-boys machos, brutaux, impitoyables qui se démolissaient la gueule à coups d’éperons et se vidaient leurs chargeurs dans le bide pour un oui ou pour un non. Les temps ont bien changé. Aujourd’hui ils sont devenus pédés et s’ils ont les jambes en cerceau ce n’est plus parce qu’ils montent à cheval ! Ils ne gardent plus de vaches mais des moutons et les ravissantes putes corsetées des « saloons » ont probablement été remplacées par des moustachus en poignets de force et slibards en latex. Tom Mix et Buffalo Bill doivent se retourner dans leurs cercueils !

 

Comme prévu, et même au-delà de mes espérances, les filles aiment beaucoup ce mélo (Ma soeur qui n’est pas forcément sentimentale a versé sa larme), plus surprenant, Pierre-Emmanuel a beaucoup aimé, mon beauf a trouvé pas mal même s’il a été parfois gêné devant « certaines scènes ». A sa décharge, Ma soeur a avoué à maman qu’elle n’aurait pas du tout été touchée de la même manière si le film avait raconté la même histoire avec deux femmes, en fait, elle n’aurait pas aimé.

 

Le film est inspiré d’une nouvelle d’Annie Proulx publiée dans le New Yorker en 1999. Adaptation plutôt fidèle si ce n’est une certaine crudité dans la nouvelle qui n’apparaît pas à l’écran et un Jack et un Ennis beaucoup plus sexys dans le film :

 

La chambre empestait le sperme, la fumée, la sueur et le whisky, la vieille moquette et le foin aigre, le cuir de selle, la merde et le savon bon marché. Ennis gisait bras et jambes écartés, vidé et humide, pantelant et encore tumescent. (…)

 

 

 

Atelier collages à Maison sur Seine

 

J’ai trouvé Armande en train de se faire coiffer par sa sœur Maria. Comme chaque fois que cette dernière est là, je parle surtout avec elle et Armande finit inévitablement à se mettre le casque sur la tête. En fait, l’évènement du jour est qu’Armande a RV avec l’animatrice d’un atelier collages au rez de chaussée sous la verrière. La psychologue nous présente sa stagiaire qui dirigera l’atelier. Celle-ci propose à Maria et à moi-même de nous joindre à elles. Maria accepte, je refuse. Finalement je change d’avis.

 

Protocole : 15 minutes pour choisir dans les magazines au maximum 5 images, la stagiaire conseille à Armande de s’en fixer 3, je la contredis en lui recommandant de prendre les 5 quitte à en éliminer 2 ensuite.

 

Un jeune black vient nous serrer la main. Il refuse l’offre de participation. Peu après arrive une noire assez forte qu’il connaît. Elle râle en anglais. Nous comprenons avec Maria qu’elle est furieuse qu’on ne soit pas venu la chercher dans sa chambre pour l’activité. « Where are you from ? » Je demande au garçon qui la connaît. « Sierra Leone ». « Trop fort de réussir à se faire soigner dans ce centre de soins palliatifs aux places si rares, sans parler un seul mot de français et en étant aussi mal aimable ! » est la seule pensée qui me vient à l’esprit. Arrive enfin un troisième participant du centre, une femme en chaise roulante, plutôt loquace par rapport à la harpie noire mais avec un appareillage planté dans le cou qui rend tout échange avec elle épuisant tant il est difficile de comprendre ce qu’elle dit.

 

Armande a très vite fini son collage. Je ne terminerai pas très longtemps après elle. Sur un fond anthracite de publicité avec un trait blanc épais vertical et un autre horizontal dans son 1er tiers. Contre le trait vertical, j’adosse à sa gauche Jake Gyllenhaal qui incarne le très séduisant Jack Twist dans « le Secret de Bareback moutain », sur l’autre côté, contre lui un chimpanzé légèrement alangui. J’ai aussi collé deux cœurs clairs de taille différente au-dessus de la tête de l’animal et pour finir comme dans une fenêtre une façade d’immeuble en Asie.

 

Au moment où la stagiaire propose de présenter aux autres son collage («en ne disant jamais « je » mais « cette image »…), je m’éclipse rapidement pour ne pas lui offrir un grand moment d’analyse. Elle me tend mon œuvre que j’oubliais.

 


[1] « With its story of enduring but forbidden love between two men in the 60’s, “brokeback mountain” is essentially a soap opera, an old fashioned story of a heartbreaking backstreet romance. It comes with a veneer of social importance, which allows critic’s groups to be proud of themselves for embracing it. But how daring is it to be in favour of rights for homosexuals in an era when Elton John has a splashy gay wedding ?”.

 

Voir les commentaires

Repost0