Publié le 10 Novembre 2006

 

 

Vers le sud

26/02/2006

 

Dans l’ensemble j’ai trouvé le dernier film de Terence Mallick, Le nouveau monde,  beaucoup trop long, cul-cul à force d’être didactique. Gabriel, s’il concède mon premier reproche, l’a aimé. Lecture de Télérama au retour du ciné : Louis Guichard est du côté de Gabriel, l’autre critique du mien en titrant « New age et glamour ».

 

Tous deux en revanche avons été touchés par l’histoire de ces quinquagénaires nord-américaines qui viennent chercher l’amour auprès de jeunes haïtiens dans les années 70, et par ce qui nous est donné à penser de leurs motivations et de celles de ces garçons pauvres qui, dés qu’ils quittent la plage de l’hôtel, retournent dans un monde de pauvreté et de violence, celui des tontons macoutes (Vers le sud, de Laurent Cantet avec Charlotte Rampling adapté à partir de trois nouvelles de l’écrivain haïtien Dany Laferrière).

 

Comment ne pas être d’accord avec Sue lorsqu’elle dit : « Soyons honnête, ici, je ne vois même pas les blancs, ils sont plutôt fades à côté des noirs, non ? » Comment ne pas partager la fascination de Brenda qui ne parvenait pas à quitter des yeux le corps de Legba lorsqu’elle l’a rencontré pour la première fois, il y a trois ans, alors qu’il avait 15 ans.

 

Le corps de Legba, qu’Ellen et Brenda se disputent, est magnifique : longues jambes fuselées, fesses rebondies, larges épaules sur un buste naturellement musclé, beau visage carré, lèvres charnues, dents blanches. Je penserai à lui en lisant l’autofiction ( ?) de Jean-Noël Pancrazi « les dollars de sable » :

 

En République dominicaine, un écrivain européen vieillissant s'éprend de son jeune guide et entame avec lui une histoire d'argent... Ecrit dans une langue superbe aux phrases interminables et mélodieuses, « les Dollars des sables » sont aussi une méditation douloureuse sur les illusions de l'exil

 

 

 

« Mon fils, prêtre ? J’espère bien que non. »

 

02/03/2006

 

 

-          Et Maxime, il est chez son père ?

 

-          Non, il est en retraite avec un groupe de copains.

 

-          Ça continue alors, sa crise mystique ? On va avoir un curé dans la famille.

 

-          Ah non, quelle horreur, j’espère bien que non. Dieu merci, ça lui plaît surtout parce qu’il s’y amuse avec ses copains et qu’il aime bien ce jeune prêtre, mais si ça devient trop religieux, ça le gave.

 

-          Ah bon ? Tu n’aimerais pas que ton fils devienne curé ? Pourquoi ?

 

-          Je veux qu’il me donne des petits-enfants.

 

-          C’est marrant, toi aussi ? Oriente le alors plutôt vers l’Eglise protestante ou la synagogue, les religieux se marient et font des enfants.

 

-           Non, j’espère bien qu’il ne deviendra rien de tout ça.

 

-          Pas pédé, alors ? Mais avec des enfants, ça pourrait faire l’affaire ?

 

Ayant renoncé depuis si longtemps à la paternité, je m’étonnai presque que ma sœur fût aussi attachée à l’idée d’avoir non seulement des enfants mais aussi des petits-enfants. Je suis à coup sûr en train de manquer quelque chose d’essentiel.

 

 

 

 

Pauvres parents d’ados à problèmes

Comme pour me vacciner d’un vague regret fugace…

 

Gary, le neveu américain, déjà 18 ans, vient d’être viré de la maison familiale parce qu’il continue à y entreposer de la poudre d’ecstasy et à dealer, et qu’il a refusé de se désintoxiquer. D’après ses parents, son père qui est avocat au pénal, pourrait perdre son travail si ce genre de choses venait aux oreilles de la police et de la justice.

Gary a obtempéré mais en leur réclamant les 2000 $ de poudre qu’ils ont jeté dans la cuvette des WC, et en les menaçant de les balancer à ceux à qui il doit la somme.

Ça ne doit pas être la super ambiance là-bas, les pauvres parents doivent se demander continuellement si ce qu’ils ont décidé est pertinent ou non.

 

 

 

Diagnostic plomberie

 

Du côté de chez Gabriel, on meurt de cancers du colon. Après sa mère et Pierre-Emmanuel, Gabriel a pris son rendez-vous coloscopie. Régime alimentaire contraignant dés le mercredi soir pour un examen le samedi à 11H30. Vendredi, après le dernier « repas », 4 litres d’une solution salée, pour lui nettoyer définitivement le gros intestin. Beaucoup de temps passé au WC, à pisser du cul. Anesthésie à jeun (pas même un verre d’eau autorisé à partir de 6H du mat) et promenade de la caméra de l’anus à l’appendice. Beaucoup de préparation pour une pénétration aussi peu sexuelle, presque dommage !

 

J’appréhendais qu’on lui trouve des nodules ou pire qu’on lui abîme l’organe (j’ai le souvenir d’un Marc qui avait dû se le faire raccourcir après un tel incident avec ce que ça implique d’handicap : « chier comme un canard »). Grâce à Dieu, j’ai récupéré un Gabriel plutôt guilleret après une collation qu’il a trouvé trop légère : « mon colon est parfait, par contre, j’ai une appendicite, faut que je passe sur le billard dés que possible ».

 

Pour lui, c’est un élément comme un autre de ces listes de choses à faire que j’établis d’habitude. J’envie sa sérénité face à ce genre de corvées, pas facile de se débarrasser d’une éducation « médecinophobe » !  A tous les coups, je ne vais pas tarder à avoir mal au ventre sur le côté droit.

 

 

Hôpital la Croix St Simon, certifié ISO neuf mille chose

18/03/2006

 

 

Lorsqu’au retour du travail, aux alentours de 19H, j’ai appelé au numéro que m’avait laissé Gabriel dans la journée, l’épouse de son compagnon de chambre hospitalisé pour occlusion intestinale m’a dit qu’il n’était toujours pas remonté du bloc. A jeun, hydratation comprise, depuis 6H du matin, qu’il a dû trouver longue cette journée du mardi à attendre !

 

Mercredi 11H, j’allais le chercher à sa sortie de l’hôpital. L’hosto est tout neuf, le personnel charmant et efficace (pas ce matin, s’est plaint Gabriel), il paraît que c’est le garagiste à choisir.

 

Pas trop mal au bide mais l’épaule droite douloureuse. Il est allé consulter un ostéo qui l’a un peu soulagé mais sans que cela soit spectaculaire sur la durée. Depuis , il se pourrait que ce soit dû aux gaz dont on l’a gonflé pour l’opération.

 

Aujourd’hui dimanche, il est à Tours : il a maintenu son projet d’aller voir sa mère ce week-end là, d’autant que ça arrangeait Pierre-Emmanuel qu’il amène Valentin puisqu’il travaille.

 

 Creative juices, 2 ass fillin’ bareback hours

 

« Sexually correct » oblige, et non sans raison dans une époque où le Sida continue à décimer, la pornographie gay s’exhibe en capote. Les bouches sucent sans mais ne boulottent pas de sperme, même s’il est de plus en plus fréquent d’apercevoir des éjaculations faciales plutôt limites. Voie la plus sûre pour choper le virus, la saillie sans capuchon est accessible pourvu qu’on puise dans un fond antérieur au milieu des années 80.  Quant au filmage en gros plan de l’organe du plus grand plaisir du passif, jusqu’à ce jour je déplorais sa trop grande rareté.  Difficulté technique de prise de vue ? Non, pas suffisant comme raison. Plutôt le trou du caca comme tabou visuel ultime.

 

L’invisibilité créant le fantasme, les images d’une grosse bite, de préférence noire, malmenant un anus dilaté qui finit par se faire arroser par un jet blanc gluant, s’étaient installées au sommet de mon panthéon d’images fantasmatiques.

 

Avec Creative juices, j’ai virtuellement réalisé ce fantasme : un certain Sean Storm, pas mal, n’a de cesse de se faire, en très gros plan, besogner et arroser le fondement par des mecs bien montés. Il a l’air vraiment d’aimer ça même s’il ne bande pas souvent. Une réserve : ses arroseurs (à la tête souvent floutée), sont pour moi beaucoup trop vieux.

 

Incertitude autour de la lisière brune de son pubis

 

Gabriel n’était pas encore remonté du bloc opératoire que Jan appelait pour prendre de ses nouvelles. Qui a téléphoné hier après-midi parce qu’il était dans en bas de la rue ? Jan.  Toujours d’une fraîcheur souriante émouvante.

 

Comme Gabriel décrivait l’usage qui avait été fait des trois petits trous de son opération, Jan voulut nous montrer sa cicatrice d’appendicite à l’ancienne. Il a sorti sa chemise de son jean, l’a relevée mettant ainsi à nu son flanc, puis a tiré son pantalon vers le bas, découvrant la lisière brune de son pubis. Encore plus émouvant.

 

J’ai aussitôt dit : « Gabriel, comme tout malade va se faire un plaisir de nous montrer ses plaies sous ses pansements » et comme Jan se demandait à quoi ça ressemblait un appendice (après avoir demandé si on disait appendicite), j’ai rajouté : « moi aussi, je n’avais aucune idée là-dessus, alors j’ai été cherché sur Internet une photo de colon et d’intestins. Toutefois, cet appendice est vraiment sans intérêt, en comparaison du deuxième, tu savais qu’on en avait deux ? »

 

Même si j’étais affairé au piano, j’ai eu le sentiment que Gabriel avait mis du temps à remonter de la cave où ils étaient descendus ensemble pour récupérer sur le vélo un élément de la lampe que Jan lui avait prêté.

 

 

 

 

Les deux faces de la nostalgie : « D’ici là » de John Berger

 

Dans ce nouveau roman, comme dans une bonne partie des autres, l’auteur fait surgir des gens disparus dans le monde des vivants. A Lisbonne, le narrateur se promène avec sa mère morte. A Cracovie, Ken, celui qui lui a appris à peindre et à boire trente ans auparavant, surgit au détour d’un marché. A Madrid, son vieil instituteur, continue à le conseiller. A Genève, le parfum de l’herbe coupée sur la tombe de Borges, lui évoque tous les commencements : matin, enfance, printemps… En fait, au bout de deux ou trois jours à Lisbonne, Berger a bien vécu à Lisbonne l’expérience de côtoyer sa mère morte. (…) «Au bout de deux ou trois jours, j’ai pensé très fort à ma mère. C’était la première fois depuis sa mort que j’avais le sentiment de sa présence. Pourquoi à Lisbonne ? Je ne me le suis pas expliqué, parce que je crois qu’elle ne m’a jamais parlé de cette ville où elle n’a jamais dû se rendre… Mais je l’ai accepté. C’est comme ça que tout a démarré… A Lisbonne, on a l’impression dans certains endroits de retourner cinquante ans en arrière. Les visages. Les vêtements… J’ai cru me retrouver dans une loupe de temps et de marcher dans une des villes de mon enfance au côté de ma mère. Je ne suis pas nostalgique. La nostalgie a deux faces. La plus courante consiste, parce que nous vivons dans un monde où l’avenir n’existe guère, à s’éloigner d’un présent menaçant pour rêver avec beaucoup de regrets le passé. L’autre prend la direction opposée et repose sur la coexistence du présent avec le passé. Ce n’est pas une évasion du présent. »

 

 

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Rédigé par Thomas Querqy

Publié dans #ciné-séries, #famille, #intergénérationnel, #avec un grand A, #sex, #les années

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