Publié le 18 Mars 2011
Projet pour le pavillon du concours de Miss General Idea :
Les colonnes du Dr Brute (1975)
D’emblée, l’idée du collectif séduit, sous ce nom on-ne-peut-plus-générique de « General Idea » (idée générale), histoire de se libérer de « la tyrannie du génie individuel».
Le point de départ de ces trois garçons de Toronto, nous dit l’un des deux commissaires qui nous guide au pas de charge dans l’exposition, est que la réalité n’est pas intéressante, que la fiction doit devenir la réalité...
... Et ils s’en sont donnés à cœur joie, notamment autour d’un projet au long cours, prétexte à une énorme production, « Miss General Idea », une Miss couronnée par un concours de beauté, « tout à la fois muse et objet, image et concept »[1].
Après deux élections organisées en 1970 et 1971, Marcel Idea (en photo ci-dessus) remporta le titre pour sa capacité à « capturer le Glamour sans tomber dedans », titre devant courir jusqu’en 1984, date annoncée du prochain concours de beauté qui serait organisé dans un Pavillon construit à cet effet.
En 1977, GI « imagine que le pavillon de la Miss, qui n'a jamais existé, a brûlé ». Il se lance donc « dans une archéologie de ses décombres, dont ils exposent les trouvailles : fresque quasi crétoise et fragments de céramiques où trois caniches sont surpris dans des positions peu catholiques (...) ... Voilà atteint le paroxysme de la fiction comme réalité. »[1]
Concours de beauté, « Glamour », des caniches omniprésents (« poodles »), parodie,... Ils ne seraient pas de l’orchestre ces mecs ?
Une salle de l’exposition lève toute ambiguïté, même si au travers du « ménage à trois », du « trouple » comme le désigne Elisabeth Lebovici pour nommer un couple de trois personnes[2]), c’est plus largement « le couple hétérosexuel, la famille nucléaire, la configuration œdipienne » qui sont visés.
Mondo Cane Kama Sutra (1982-1983)
Baby makes (1984-1989)
P is for Poodle (1983-1989)
Influencés par la sémiotique, l’art conceptuel, obsédés par le glamour et la célébrité produits par les mass-médias, GI use de la parodie, de l’ironie et du « camp »[1] pour subvertir les constructions de la culture populaire. Malgré leur projet Miss General Idea et leurs autoportraits qui révélaient leur identité « camp gay», les trois artistes n’ont pas mentionné publiquement leur orientation sexuelle jusqu’à ce qu’ils ne travaillent plus que pour leur tentaculaire projet autour de l’épidémie du SIDA, à la fin des années 80.
La mort tragique de Felix et Jorge des suites de cette maladie marqua la fin de GI comme collectif artistique. [2]
[1] Un style de l’excès, du contraste criard, du ridicule assumé, théâtralité d’un mauvais goût délibéré qui brouille les démarcations claires du beau et du laid, de la convenance et de la malséance, mais aussi de la copie et de l’original. « Notes on Camp » in Susan Sontag Against Interpretation, and other Essays -1964 (NGT / Le style "camp" selon Susan Sontag)
Un dessin de Bruce Nauman sur un fond de papier peint AIDS,
détournement du LOVE créé en 1964 par Robert Indiana (1989)
One year of AZT (1991)
Playing doctor (1992)
Fin de siècle (1994)
Haute culture : General Idea au MAM de Paris
jusqu’au 30 avril 2011
Vidéo de présentation de l'exposition
Telerama.fr/ La marque du pluriel
Courrierinternational.com/ Peut-on encore distinguer haute et basse culture ?
NGT/ Archéologie "San Francisco ou Sodome suspendue
Nazi milk (1979) en écho à une campagne sanitaire d’injonction à boire du lait