Publié le 5 Novembre 2011

 

med_sergey-maximishin-putin-2003.jpg

 

Poutine par Sergey Maximishin 

 

 

« Molodiets », bon petit gars

 

Sarah m’a dit que le Limonov d’Emmanuel Carrère se vendait comme des petits pains. Je l’ai lu d’une traite, sans doute pour toutes les raisons qu’en donne Pierre Assouline. De là à dire qu’Edouard est un «bon petit gars », il y a de la marge...

 

«Hi, dit Edouard, je m’appelle Ed, tu n’as pas quelque chose à fumer ?

-          Fuck off », gronde l’autre. Pas vexé, Edouard vient s’accroupir près de lui. Sans crier gare, le Noir lui saute dessus, le frappe. Leurs corps emmêlés roulent dans le bac à sable. Ils luttent. Edouard parvient à libérer une main, va chercher son couteau dans sa botte, et peut-être aurait-il frappé si, de façon aussi inattendue qu’il l’a attaqué, son adversaire ne lâchait prise. Ils restent tous les deux l’un contre l’autre, à reprendre leur souffle sur le sable humide.

-          « J’ai envie de toi, dit Edouard. Tu veux qu’on fasse l’amour ? »

Ils se mettent à s’embrasser, à se caresser. Le jeune Noir a la peau douce et, sous ses vêtements malodorants, un corps musclé, compact, assez semblable au sien. Lui aussi remue la tête, les yeux mi-clos, et il murmure : « Baby, baby.... » Edouard se penche, défait sa ceinture, impatient de savoir si c’est vrai, ce qu’on dit des bites des nègres. [...]

 

 

eduardlimonovfuckoffamerika.jpg

 

 

Plus tard, il baisse son pantalon et son slip, fait pour offrir son cul le geste que faisait Elena et dit à Chris : « Fuck me. »

Chris crache sur sa bite et la lui met. Bien qu’elle soit plus grosse que la bougie, son entraînement lui sert : ça ne lui fait pas trop mal. Quand Chris jouit, ils s’abattent tous les deux dans le sable et s’endorment ainsi. Il se réveille un peu avant l’aube, se dégage de l’étreinte du jeune Noir qui grogne doucement, tâtonne pour retrouver ses lunettes, puis s’en va. Il marche dans la ville qui s’éveille, totalement heureux et fier de lui. Je n’ai pas eu peur, pense-t-il, je me suis fait enculer. « Molodiets », comme dirait son père : bon petit gars.

 

Limonov d’Emmanuel Carrère POL

 

 

CARAVAGGIOsangiovannibattistagalleriacorsini.jpg

 

Caravaggio per sempre

 

Edouard Limonov a nourri son œuvre de sa vie. De manière moins immédiate, il en va de même pour celle d’un autre voyou tout aussi caractériel : le Caravage.

A Rome, j’ai toujours rendez-vous avec les tableaux de celui qui m’a vraiment fait aimer la peinture (dernier rendez-vous, il y a plus d’une dizaine d’années tout de même).

« Il faut absolument que vous alliez au Palazzo Doria Pamphili, nous dit ce soir là Sarah, il n’y a pas un chat dans ce magnifique palais un peu décati et des dizaines de chef d’œuvre. »

 

Il y en avait tellement que j’ai manqué un Caravage et pas n’importe lequel : « T’as vu le Caravage, tu sais celui qu’on a dans la chambre ? m’a demandé Gabriel que je venais de retrouver - Nein ! Wo ? J’y retourne. »

 

 

Caravaggio_sangiovannibattistapinacotecacapitolina.jpg

 

 

Au-dessus d’un autre tableau, dans une galerie qui m’avait échappée, je le trouve assez vite. Pas très bien éclairé mais tout de même épatant. Problème. Peu après, j’en trouve un second. Lequel est une copie ? Peut-être les deux après tout. Mon plaisir est un peu gâché et je me découvre fétichiste de la relique : l’idée de leur reproduction leur faisait bien perdre leur aura.[1]

 

Le lendemain, Paulo nous rejoint à la sortie du Palazzo Barberini, je lui demande de me montrer les reproductions qu’il a achetées : La Fornarina par Raphael, seins nus, et un autre nu féminin de dos. De mon côté, le Saint François en « vanité » du Caravage et son Narcisse qu’on a trouvé nulle part dans les salles, pas plus d’ailleurs qu’un message qui nous aurait indiqué que le tableau était en restauration ou prêté.

 

... Décidément, « l’art n’est pas chaste ».


[1] Je viens à l’instant de lire sur Internet que l’original se trouve à la pinacothèque du Capitole et que l’un des deux exemplaires du palais Doria Pamphili pourrait avoir été exécuté par le Caravage. Lequel ? Faut que j’y retourne.

 

 

 

caravaggio_narcisopalazzobarberini.jpg

 

 

Voir les commentaires

Rédigé par Thomas Querqy

Publié dans #Italie, #livres, #culture gay, #touriste

Repost0