touriste

Publié le 29 Août 2006

Homosexualité et socialisme

25/6/01

Difficile de s’apitoyer sur le sort de Cédric si l’on considère la manière dont étaient traités chez nous les homosexuels dans le passé (Cf par exemple « les bûchers de Sodome » de M. Lever) ou sous d’autres latitudes. A une semaine d’intervalle, j’ai pu voir deux évocations émouvantes de l’enfer vécu par les homosexuels dans les régimes communistes.


Dans son documentaire « Je suis la Folle de Brejnev », Frédéric Mitterrand s’intéresse à la Russie soviétique ; avec son film « Avant la nuit » qui retrace la vie de l’écrivain cubain Reinaldo Arenas, Julian Schnabel évoque lui le communisme sous les tropiques. Dans les deux cas, sont soulignés le bref espoir qu’a pu faire naître la révolution chez les « infâmes » : comment un projet aussi nouveau et radical promettant le bonheur pour tous ne pouvait-il pas inclure la fin de l’homophobie qui régnait en maître jusqu’alors ?

 

 

Le désordre qui précéda l’avènement de cet ordre nouveau, les espaces de liberté qu’il ne manqua pas d’offrir, ont pu le leur faire croire. Dans les deux cas, très rapidement, l’homosexualité est déclarée contre-révolutionnaire, ce qui légitime la persécution systématique de toutes les personnes homosexuelles ou soupçonnées d’homosexualité, a fortiori s’il s’agit d’intellectuels, libres-penseurs par nature.

Que ce soit sous la neige ou sous les cocotiers, ce sont des vies brisées par la délation, les faux témoignages, l’humiliation, la peur (Noureev se serait refusé toute relation sexuelle avant son exil), la prison, les camps, la manipulation, et pour les plus forts ou les plus chanceux l’exil. En URSS comme à Cuba, la création artistique a offert un moyen de survie aux artistes homosexuels, dans les deux pays ce sont des textes qui furent envoyés clandestinement à l’étranger pour les faire éditer : «ce livre était la seule preuve que j’étais vivant » dira Reinaldo à un policier qui lui montre un de ses livres parus clandestinement (Johnny Deep qui joue également avec brio le rôle d’un travesti qui, contre une quantité phénoménale de cigarettes, sort de prison les écrits d’Arenas en les planquant dans son rectum).

 

L’hommage fait à Reinaldo Arenas est magnifique : poésie des images et des situations pour évoquer le poète, insertion d’images d’actualité ou reconstitution de la grande histoire, onirisme baroque d’une fête clandestine,…

J’y apprends aussi que son roman « Le portier » qui m’avait tant amusé s’est nourri des récits de son compagnon qui a exercé ces fonctions (Cédric Martinez).

Vie de merde jusqu’au bout : expulsé par Castro en 1980 avec tous les indésirables du régime, il se suicide 10 ans après ravagé par le SIDA et la misère.

Côté Russie, l’avènement du libéralisme sauvage a-t-il apporté avec lui celui des mœurs ? On en est loin si l’on en juge les témoignages que contient le sujet de Mitterrand : que ce soit les tapins de St Petersbourg (Léningrad) et de Moscou, les transformistes interviewés ou une star nationale du 3e sexe, impossible de leur faire cracher qu’ils sont homosexuels ! Faut-il que la pression homophobe soit forte. Ça évolue lentement une mentalité.

 

Toute représentation échappe à son auteur...

Par quel paradoxe, les États totalitaristes du XXe siècle qui ont persécuté les homosexuels ont-ils autant exaltés le corps masculin ? Comment, en connaissant l’horreur de ces régimes, ai-je pu malgré tout ressentir une émotion esthétique face à certaines de ces représentations qui glorifiaient l’homme hétérosexuel travailleur et soldat ?

 

 

 

Il me revient en particulier en mémoire la jubilation que j’ai ressenti lorsque j’ai visité le « musée des mouvements ouvriers » à Budapest. J’y suis allé en 1987 à l’occasion d’un chantier international organisé par « Jeunesse et Reconstruction ». Contre une semaine à castrer des maïs dans un sovkhoze, le groupe constitué de deux finlandais, de quelques français et surtout d’hongrois, de lituaniens, d’allemands de l’est et russes, était amené une journée au lac Balaton et était logé trois jours à Budapest.

Le musée était riche de ces innombrables affiches de propagande communiste. Était-ce aussi la compagnie du petit hongrois très mignon et rempli d’énergie qui le visitait aussi et qui m’a servi de guide ? Je crois avoir exulté au point de vouloir à tout prix emporter avec moi quelques reproductions de ces affiches. L’une d’entre elle a longtemps été accrochée au mur de ma chambre dans le garage, il s’agissait d’un jeune homme bombant le torse les deux bras levés au dessus de la tête en forme de V de la victoire sur un fond rouge, dessous une date 1919 et « Végré ! » autrement dit « Enfin ! » Elle faisait référence à la prise de pouvoir (avortée) par les communistes de Bela Kun. Mon p’tit hongrois était le fils de l’ambassadeur de Hongrie en Angola, communiste pur jus, ayant des origines en Transylvanie roumaine, il voulait lever une armée pour la récupérer, j’avais alors trouvé cela sympathique (sic).

 

 

 

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Rédigé par Thomas Querqy

Publié dans #culture gay, #livres, #ciné-séries, #touriste

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